Les attrape-vents 2007 - 2009
Vidéo d'accompagnement Mehdi Benboubakeur
2007, Zone d'affluence - promenade des arts inattendus de Mercier
2008, galerie Lilian Rodriguez et Les escales improbables de Montréal
2009, galerie Nuha Al-Ali, Damas, Syrie
2013, Clay and Glass Gallery
2016, Maison des arts de Laval et le musée régonal de Rimouski
2018, musée national des beaux-arts du Québec, exposition Fait Mains
Vidéo de Mehdi Benboubakeur












Les attrape-vents
Galerie Lilian Rodriguez, 2008
« Les attrape-vents » sont nés à un moment précis de ma démarche alors que je produisais une série d’œuvres intitulées « les vents » et que mon travail de collaboration avec des musiciens s’amorçait. J’ai toujours considéré que la forme d’une pièce était définie autant par son volume que par l’espace intérieur et extérieur qu’elle occupe. Comme le dit le tao chinois « De l’argile, nous faisons un pot, mais c’est le vide à l’intérieur qui retient ce que nous voulons ». Il m’est donc apparu évident que les motifs gravés sur les parois extérieures « des vents » trouveraient aussi leur sens à l’intérieur des pièces, là où se déploie le vide et s’amplifie le son. J’ai donc retourné, comme un gant, mes pièces sur elles-mêmes.
Les motifs que je grave sur l’argile s’inspirent des cartes des vents ou cartes isobariques. Sur ces cartes, on peut lire les directions et les variations d’intensité des vents. Ces graphiques, qui traduisent la puissance des vents, étonnent aussi par leur esthétisme où les courbes et les lignes se lovent dans un mouvement qui apparaît fluide et changeant. En associant les caractéristiques du vent à mon savoir-faire de potière, je fixe les motifs représentant autant l’énergie et la force que le vent génère que les pressions et les manipulations que j’exerce sur l’argile en transformation pour l’élévation d’un pot. Par sa nature, le vent ne monte-t-il pas et ne redescend-il pas aussi dans un mouvement perpétuel et circulaire? Si cette force agissante du vent qui court est perceptible directement par nos sens, elle n’en est pas moins insaisissable malgré les phénomènes qu’elle crée et ces pouvoirs sur l’environnement. On ne peut qu’essayer d’en saisir l’amplitude. De la même manière, « les attrape-vents », tout comme mes sculptures précédentes, cherchent à montrer cette dynamique invisible de l’espace.
Travaillant cette réflexion autrement, j’ai aussi réalisé une série de « dessins » sur papier suivant la méthode de transfert. En roulant l’argile crue sur du papier, l’humidité de la terre absorbée par le papier combinée au retrait de la terre en séchant froisse et plisse le papier afin de créer des dessins en reliefs. Ce travail de transfert met en mouvement toutes les forces en jeu, celles de l’argile, de mes mains qui imposent une forme à la terre et du papier qui par les qualités de ses fibres et de son épaisseur participe aussi à l’émergence de ces impressions. Ces dessins se présentent donc comme des topographies imaginaires qui retracent le déplacement de l’humidité de la terre dans l’atmosphère du papier.
En conjuguant les papiers et les attrape-vents, il se crée une étonnante rencontre visuelle entre les plis des papiers et les motifs de la porcelaine. La disparité des matières en jeu s’estompe au profit d’une lecture en continu d’un motif à un autre. La blancheur des papiers et celle de la porcelaine retiennent la lumière et révèlent le relief encore davantage. Finalement, cette rencontre traduit la perméabilité et l’interaction des différentes forces en présence et le souffle qui l’anime.
Finalement, une bande vidéo accompagne cette exposition. Il s’agit d’une œuvre que j’ai réalisée en collaboration avec le cinéaste indépendant Mehdi Benboubakeur. Le film a été tourné à l’intérieur de trois attrape-vents. Bien que les motifs et les dessins soient magnifiés par la caméra et la lumière, c’est le mouvement qui devient ici le sujet principal de l’œuvre. Non pas celui de la caméra puisqu’elle est fixe, mais celui des attrape-vents qui tournent sur eux-mêmes. Ce faisant, c’est la matière, l’argile qui retrouve sa souplesse et sa malléabilité d’origine.