Là où cueillir la chute, est un projet de recherche qui réunie mes nouveaux dessins d’argile crue, bols chantants, souffles et autres céramiques à des enregistrements de musiques, sur disque vinyle, de quatre de mes collaborateurs, des artistes accomplis, d'autres cultures, performeurs et musiciens: Ziya Tabassian, percussionniste, Olivier Girouard électroacousticien et compositeur, Peter Morin artiste et commissaire de la première nation des Tahltans et Navid Navab artiste multidisciplinaire et compositeur.
Ce projet est subventionné par le Conseil des arts et des lettres du Québec.
Du début
J'utilise l’argile comme matériau de base dans la réalisation de mes œuvres. Cette matière, que l’on trouve partout sur l’écorce terrestre me fascine. Elle porte l’histoire du monde. C’est le constat auquel j'arrive depuis que je cueille en nature des argiles. Chacune a ses spécificités qui racontent le territoire et les communautés qui l'habitent.
C’est la première fois que j'en cueille dans la grande région de Montréal, là où je vis. C'est avec la précieuse aide de monsieur Victor Girouard, ingénieur agronome, que nous avons accompagné sur une des terres de sa famille à Saint-Hyacinthe, que nous avons cueilli l'argile qui est à la base de toute cette entreprise. Je ne me doutais pas de tout ce que j'allais apprendre.
Chemin faisant
La plaine de Montréal fut le principal bassin de sédimentation d’argile de la mer de Champlain dont la présence remonte à 10 000ans. Cette argile est aux fondements des spécificités de la région et des richesses qu’elles nous lèguent. Aujourd’hui, ces terres sont considérées comme parmi les meilleures terres agricoles du Québec. J'y ai découvert une argile riche, facile à manipuler avec laquelle j'ai dessiné et tourné. Elle est grise en nature et une fois cuite devient d'un bel orangé. Mieux, elle résonne et chante. Voilà, à ce qu'il me semblait, tout ce qu'il fallait pour lancer notre projet collectif d'argile et de musique. Réunis autour de bols chantants, de dessins d’argile, de sculptures en terre et de mes prises de son, ils ne nous restaient qu'à imaginer une suite.
Mais l’arrêt subit lié à la pandémie a retourné le projet sur lui-même et freiné nos élans. Éloignés les uns des autres, dans l’impossibilité de se rencontrer tous ensemble, il a fallu s’inventer un lieu où faire vivre autrement ce projet. J’ai toujours considéré mes collaborations autant comme des réalisations artistiques que des rencontres humaines. Elles m’ont essentiellement appris l’importance de l’écoute. C’est de cet endroit, l’écoute, aussi abstrait qu’il y parait et où il importe plus que tout d’être attentif à l’autre que Là où cueillir la chute s’est installé à demeure, dans la générosité du cœur, du souffle et de la terre, dans le partage des histoires racontées. Merci, Olivier, Peter, Navid et Ziya d’être là.
Hand Talk et langue Tahltan sont les derniers volets de ce qui constitue l'élaboration du projet en une performance musicale en direct.
Nous avons lancé notre disque le 25 septembre 2023 dans mon atelier et avons pu compter sur la contribution inestimable et la générosité de Mélanie Cody.
Mélanie est une linguiste d'origine Cherokee, Choctaw, Shawnee, Pamunkey, Narragansett, Montaukett, Mohawk et Pequot. Elle a traduit Mom's Song en langage des signes PISL (Plains Indian Sign Language).
Tout a commencé lorsque des amis m’ont envoyé une vidéo racontant l’histoire cachée du «Hand Talk».
Je l'ai regardée et j'ai été complètement déstabilisé par tout ce que j'ai appris en seulement 10 minutes.
D'après Wikipédia :« La langue des signes des autochtones des plaines (PISL), également connue sous le nom de Hand Talk ou Plains Sign Language, est une langue en voie de disparition commune à diverses nations des plaines dans ce qui est aujourd'hui le centre du Canada, le centre et l'ouest des États-Unis et le nord du Mexique. Cette langue des signes a été utilisée historiquement comme lingua franca, notamment pour le commerce entre les nations ; elle est encore utilisée pour raconter des histoires, pour les oraisons, pour diverses cérémonies, et par les personnes sourdes pour un usage quotidien ordinaire».
J'ai d'abord demandé à Peter s'il serait intéressé par la traduction de Mom's Song, cinquième titre du disque, en Hand Talk. Il a répondu par l'affirmative. J'ai pris la chance d'envoyer un courriel à Melanie. Son nom figurait sur la page des crédits de la vidéo. Elle m'a répondu dans l'heure.
Ce que je considérais comme une chanson de deux phrases, facile à traduire, s'est transformé en une traduction très réfléchie en Hand Talk. Les noms spirituels autochtones, les mots qui n'existaient pas en Hand Talk ou la structure des maisons Tahltan étaient autant de questions approfondies qui nécessitaient une réponse sensible afin de donner à la chanson toute sa force en Hand Talk.
Melanie m'a appris à signer la chanson.
Cette traduction avec les mains est maintenant la façon dont j'aborde la chanson et dont je ressens les liens avec mes ancêtres.
Finalement, Peter a aussi fait traduire en langue Tahltan la chanson que sa mère lui a chanté, Mom's Song.
Argile cueillie en été au rang Saint-François à Saint-Hyacinthe.
Souffle, Marie
Argile de Saint-Hyacinthe fraîchement tournée
Souffle
Peter Morin sur le lieu de la cueillette d'argile à Saint-Hyacinthe
Bol chantant et résonant ,
Video de Charlotte Lacoursière
Gouttière, Marie
Souffle
Ziya Tabassian: peau de tambour
Rencontres